Alain Gabrieli.
Candidat à Toulouse, ce militant socialiste deviendra peut-être, le 16
mars prochain, le second conseiller général handicapé moteur de France.
La campagne
électorale pour les élections cantonales des 9 et 16 mars 2008 est lancée
dans le 5e canton de Toulouse (Haute-Garonne). Deux candidats se sont
actuellement déclarés et s'affrontent pour occuper le siège que la conseillère
sortante, l'U.M.P Jacqueline Baylé, laisse vacant : l'U.M.P Jean-Jacques
Bolzan et le socialiste Alain Gabrieli. Né infirme moteur cérébral,
ce dernier se déplace en fauteuil roulant électrique, sans que son handicap
physique lourd n'ait altéré sa faconde toute méridionale. À 43
ans, ce professeur célibataire affronte les électeurs dans un scrutin
uninominal, d'homme à homme : "C'est le président du Conseil Général,
Pierre Izard, qui m'a demandé de me présenter. Il a fait le forcing
pour imposer ma candidature aux instances locales du Parti Socialiste,
pour que je puisse activement participer à la mise en oeuvre des dispositions
de la loi de février 2005 au sein du Conseil Général de Haute-Garonne.
Je siège déjà au sein de la Commission des droits et de l'autonomie
de la Maison Départementale des Personnes Handicapées. En 2003, j'avais
créé une association de services à la personne, Carpe
Diem Premium, qui emploie actuellement 31 salariés, et que je viens
de placer sous l'égide du Conseil Général parce qu'il finance les majorations
d'heures de nuit et du week-end que la législation ne prend pas en compte.
À Toulouse et dans le département, les personnes handicapées bougent
pas mal, revendiquent, et c'est bien, avec de fortes personnalités comme
Dominique Rabaud ou Yannick Martin". Celui-ci s'était distingué
en s'affichant nu lors d'une manifestation de personnes handicapées
sur la place du Capitole, ce qui lui avait valu d'être exclu du Conseil
départemental de l'Association des Paralysés de France...
Pierre Izard ne s'est pas contenté de faciliter la candidature d'Alain Gabrieli, il le soutient activement dans sa campagne : "Il y a sept ans, j'étais candidat aux municipales sur la liste socialiste de François Simon qui, lui aussi, était venu me chercher. Je ne voulais pas jouer le rôle du 'handicapé de service', j'étais placé en position éligible". Mener campagne en fauteuil roulant n'est pas chose aisée : "Il m'est difficile de faire du porte-à-porte, à cause de l'inaccessibilité de nombreux immeubles, alors que c'est essentiel pour une élection. On travaille différemment, les militants me 'rabattent' les citoyens. Sur un marché, c'est plus compliqué, il ne faut pas que les militants debout me cachent à la vue des passants. Mais le contact est naturel, bien que je sois tétraplégique. Je suis connu, né dans ce canton à la fois résidentiel et commerçant, qui englobe une partie du Vieux Toulouse. Il n'y a ni peur ni rejet. Je n'ai absolument aucune appréhension, d'ailleurs je n'y ai pas pensé !". |
La vie d'Alain
Gabrieli, ancien sportif de haut-niveau en tir aux armes, est bien remplie,
entre ses activités militantes, la direction de son association, et
son métier d'enseignant : "Je suis professeur de droit et d'économie
auprès d'élèves de BTS et de classes préparatoires aux grandes écoles.
J'ai obtenu le CAPES en 1993, en passant l'oral, pour cause d'inaccessibilité,
dans un authentique placard à balais ! Et comme je ne peux pas écrire,
on n'avait attribué une assistante qui m'avait dit, durant les épreuves,
qu'avec le handicap que j'avais, je ferais mieux de faire autre chose...".
Le voilà qui enseigne depuis 12 ans dans un lycée toulousain de son
canton.
Il semble d'ailleurs regretter n'avoir qu'un seul adversaire dans la
bataille : "Hier, on était sur le même marché, c'était très bon enfant.
J'ai le sentiment qu'il veut me ménager, ça me freine dans ce que je
voudrais faire passer. Il a décliné un débat contradictoire, ça m'aurait
bien plu. Moi, je suis hyper identifiable : les gens me reconnaissent
immédiatement. Je suis optimiste, mais je ne suis pas encore élu. Ça
dépendra du contexte politique, des militants. C'est un travail de fond,
loin d'être gagné. Je ne fais pas campagne sur le handicap, mais sur
les problèmes du canton. Mais même mon coiffeur, qui est U.M.P, dit
qu'il va voter pour moi !".
S'il remportait l'élection, Alain Gabrieli a déjà prévu d'opter pour
un mi-temps d'enseignement pour se consacrer à son mandat. Il rejoindrait
alors le club très fermé des élus handicapés au scrutin uninominal en
en devenant le deuxième membre, le premier étant Louis
Cuénin, dans le Doubs. Verdict des urnes le 16 mars 2008.
Laurent
Lejard, février 2008.
Source : www.yanous.com